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Guillaume Apollinaire: Alcools
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Elektronická kniha: Guillaume Apollinaire – Alcools (jazyk: Francouzština)
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Formát | ePub, MOBI, PDF |
Mon verre est plein d'un vin trembleur comme une flamme Ecoutez la chanson lente d'un batelier Qui raconte avoir vu sous la lune sept femmes Tordre leurs cheveux verts et longs jusqu'a leurs pieds Debout chantez plus haut en dansant une ronde Que je n'entende plus le chant du batelier Et mettez près de moi toutes les filles blondes Au regard immobile aux nattes repliées Le Rhin le Rhin est ivre où les vignes se mirent Tout l'or des nuits tombe en tremblant s'y refléter La voix chante toujours a en râle-mourir Ces fées aux cheveux verts qui incantent l'été Mon verre s'est brisé comme un éclat de rire
Le mai le joli mai en barque sur le Rhin Des dames regardaient du haut de la montagne Vous êtes si jolies mais la barque s'éloigne Qui donc a fait pleurer les saules riverains Or des vergers fleuris se figeaient en arrière Les pétales tombés des cerisiers de mai Sont les ongles de celle que j'ai tant aimée Les pétales flétris sont comme ses paupières Sur le chemin du bord du fleuve lentement Un ours un singe un chien menés par des tziganes Suivaient une roulotte traînée par un âne Tandis que s'éloignait dans les vignes rhénanes Sur un fifre lointain un air de régiment Le mai le joli mai a paré les ruines De lierre de vigne vierge et de rosiers Le vent du Rhin secoue sur le bord les osiers Et les roseaux jaseurs et les fleurs nues des vignes
Ottomar Scholem et Abraham Loeweren Coiffés de feutres verts le matin du sabbat Vont a la synagogue en longeant le Rhin Et les coteaux où les vignes rougissent la-bas Ils se disputent et crient des choses qu'on ose a peine traduire Bâtard conçu pendant les règles ou Que le diable entre dans ton père Le vieux Rhin soulève sa face ruisselante et se détourne pour sourire Ottomar Scholem et Abraham Loeweren sont en colère Parce que pendant le sabbat on ne doit pas fumer Tandis que les chrétiens passent avec des cigares allumés Et parce qu'Ottomar et Abraham aiment tous deux Lia aux yeux de brebis et dont le ventre avance un peu Pourtant tout a l'heure dans la synagogue l'un après l'autre Ils baiseront la thora en soulevant leur beau chapeau Parmi les feuillards de la fête des cabanes Ottomar en chantant sourira a Abraham Ils déchanteront sans mesure et les voix graves des hommes Feront gémir un Léviathan au fond du Rhin comme une voix d'automne Et dans la synagogue pleine de chapeaux on agitera les loulabim Hanoten ne Kamoth bagoim tho/ahoth bakoumim
Mon beau tzigane mon amant Ecoute les cloches qui sonnent Nous nous aimions éperdument Croyant n'être vus de personne Mais nous étions bien mal cachés Toutes les cloches a la ronde Nous ont vus du haut des clochers Et le disent a tout le monde Demain Cyprien et Henri Matie Ursule et Catherine La boulangère et son mari Et puis Gertrude ma cousine Souriront quand je passerai Je ne saurai plus où me mettre Tu seras loin Je pleurerai J'en mourrai peut-être
A Bacharach il y avait une sorcière blonde Qui laissait mourir d'amour tous les hommes a la ronde Devant son tribunal l'évêque la fit citer D'avance il l'absolvit a cause de sa beauté O belle Loreley aux yeux pleins de pierreries De quel magicien tiens-tu ta sorcellerie Je suis lasse de vivre et mes yeux Sont maudits Ceux qui m'ont regardée évêque en ont péri Mes yeux ce sont des flammes et non des pierreries Jetez jetez aux flammes cette sorcellerie Je flambe dans ces flammes ô belle Loreley Qu'un autre te condamne tu m'as ensorcelé Evêque vous riez Priez plutôt pour moi la Vierge Faites-moi donc mourir et que Dieu vous protège Mon amant est parti pour un pays lointain Faites-moi donc mourir puisque je n 'aime rien Mon coeur me fait si mal il faut bien que je meure Si je me regardais il faudrait que j'en meure Mon coeur me fait si mal depuis qu'il n'est plus la Mon coeur me fit Si mal du jour où il s'en alla L'évêque fit venir trois chevaliers avec leurs lances Menez jusqu'au couvent cette femme en démence Va-t'en Lore en folie va Lore aux yeux tremblants Tu seras une nonne vêtue de noir et blanc Puis ils s'en allèrent sur la route tous les quatre La Loreley les implorait et ses yeux brillaient comme des astres Chevaliers laissez-moi monter sur ce rocher si haut Pour voir une fois encore mon beau château Pour me miter une fois encore dans le fleuve Puis j 'irai au couvent des vierges et des veuves La-haut le vent tordait ses cheveux déroulés Les chevaliers criaient Loreley Loreley Tout la-bas sur le Rhin s'en vient une nacelle Et mon amant s'y tient il m'a vue il m'appelle Mon coeur devient si doux c'est mon amant qui vient Elle se penche alors et tombe dans le Rhin Pour avoir vu dans l'eau la belle Loreley Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil
Dans la forêt avec sa bande Schinderhannes s'est désarmé Le brigand près de sa brigande Hennit d'amour au joli mai Benzel accroupi lit la Bible Sans voir que son chapeau pointu A plume d'aigle sert de cible A Jacob Born le mal foutu Juliette Blaesius qui rote Fait semblant d'avoir le hoquet Hannes pousse une fausse note Quand Schulz vient portant un baquet Et s'écrie en versant des larmes Baquet plein de vin parfumé Viennent aujourd'hui les gendarmes Nous aurons bu le vin de mai Allons Julia la mam'zelle Bois avec nous ce clair bouillon D'herbes et de vin de Moselle Prosit Bandit en cotillon Cette brigande est bientôt soule Et veut Hannes qui n'en veut pas Pas d'amour maintenant ma poule Sers-nous un bon petit repas Il faut ce soir que j'assassine Ce riche juif au bord du Rhin Au clair des torches de résine La fleur de mai c'est le florin On mange alors toute la bande Pète et rit pendant le dîner Puis s'attendrit a l'allemande Avant d'aller assassiner
Les enfants des morts vont jouer Dans le cimetière Martin Gertrude Hans et Henri Nul coq n'a chanté aujourd'hui Kikiriki Les vieilles femmes Tout en pleurant cheminent Et les bons ânes Braillent hi han et se mettent a brouter les fleurs Des couronnes mortuaires C'est le jour des morts et de toutes leurs âmes Les enfants et les vieilles femmes Allument des bougies et des cierges Sur chaque tombe catholique Les voiles des vieilles Les nuages du ciel Sont comme des barbes de biques L'air tremble de flammes et de prières Le cimetière est un beau jardin Plein de saules gris et de romarins Il vous vient souvent des amis qu'on enterre Ah! que vous êtes bien dans le beau cimetière Vous mendiants morts saouls de bière Vous les aveugles comme le destin Et vous petits enfants morts en prière Ah! que vous êtes bien dans le beau cimetière Vous bourgmestres vous bateliers Et vous conseillers de régence Vous aussi tziganes sans papiers La vie vous pourrit dans la panse La croix vous pousse entre les pieds Le vent du Rhin ulule avec tous les hiboux Il éteint les cierges que toujours les enfants rallument Et les feuilles mortes Viennent couvrir les morts Des enfants morts parlent parfois avec leur mère Et des mortes parfois voudraient bien revenir Oh ! je ne veux pas que tu sortes L'automne est plein de mains coupées Non non ce sont des feuilles mortes Ce sont les mains des chères mortes Ce sont tes mains coupées Nous avons tant pleuré aujourd'hui Avec ces morts leurs enfants et les vieilles femmes Sous le ciel sans soleil Au cimetière plein de flammes Puis dans le vent nous nous en retournâmes A nos pieds roulaient des châtaignes Dont les bogues étaient Comme le coeur blessé de la madone Dont on doute si elle eut la peau Couleur des châtaignes d'automne
Les sapins en bonnets pointus De longues robes revêtus Comme des astrologues Saluent leurs frères abattus Les bateaux qui sur le Rhin voguent Dans les sept arts endoctrinés Par les vieux sapins leurs aînés Qui sont de grands poètes Ils se savent prédestinés A briller plus que des planètes A briller doucement changés En étoiles et enneigés Aux Noëls bienheureuses Fêtes des sapins ensongés Aux longues branches langoureuses Les sapins beaux musiciens Chantent des noëls anciens Au vent des soirs d'automne Ou bien graves magiciens Incantent le ciel quand il tonne Des rangées de blancs chérubins Remplacent l'hiver les sapins Et balancent leurs ailes L'été ce sont de grands rabbins Ou bien de vieilles demoiselles Sapins médecins divagants Ils vont offrant leurs bons onguents Quand la montagne accouche De temps en temps sous l'ouragan Un vieux sapin geint et se couche
Dans la maison du vigneron les femmes cousent Lenchen remplis le poêle et mets l'eau du café Dessus - Le chat s 'étire après s 'être chauffé - Gertrude et son voisin Martin enfin s s’épousent Le rossignol aveugle essaya de chanter Mais l'effraie ululant il trembla dans sa cage Ce cyprès la-bas a l'air du pape en voyage Sous la neige - Le facteur vient de s 'arrêter Pour causer avec le nouveau maître d'école - Cet hiver est très froid le vin sera très bon - Le sacristain sourd et boiteux est moribond - La fille du vieux bourgmestre brode une étole Pour la fête du curé La forêt la-bas Grâce au vent chantait a voix grave de grand orgue Le songe Herr Traum survint avec Sa soeur Frau Sorge Kaethi tu n 'as pas bien raccommodé ces bas - Apporte le café le beurre et les tartines La marmelade le saindoux un pot de lait - Encore un peu de café Lenchen s'il te plaît - On dirait que le vent dit des phrases latines - Encore un peu de café Lenchen s'il te plaît - Lotte es-tu trille O petit coeur - Je crois qu'elle aime - Dieu garde - Pour ma part je n 'aime que moi-même - Chut A présent grand-mère dit son chapelet - Il me faut du sucre candi Leni je tousse - Pierre mène son furet chasser les lapins Le vent faisait danser en rond tous les sapins Lotte l'amour rend triste - Ilse la vie est douce La nuit tombait Les vignobles aux ceps tordus Devenaient dans l'obscurité des ossuaires En neige repliés et gisaient la des suaires Et des chiens aboyaient aux passants morfondus Il est mort écoutez La cloche de l'église Sonnait tout doucement la mort du sacristain Lise il faut attiser le poêle qui s'éteint Les femmes se signaient dans la nuit indécise Septembre 1901-mai 1902.
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